Doctorats honoris causa
Cette haute distinction rend hommage à des personnalités dont le rayonnement est remarquable et exemplaire dans ses sphères d'activité. Les récipiendaires proviennent du monde universitaire ou de la société civile au Québec, au Canada et à l’international.
2022
Bibiane Courtois
Infirmière et militante
Doctorat honoris causa en sciences infirmières
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En 1967, une jeune femme de la Première Nation des Pekuakamiulnuatsh commence sa carrière à l'hôpital Ste-Élisabeth de Roberval. Première infirmière laïque de cet établissement psychiatrique, elle s'engage rapidement dans l'humanisation des soins dispensés aux personnes psychiatrisées. C'est cette humanité qui amènera Bibiane Courtois à devenir une infirmière remarquable ainsi qu'une grande défenseure des droits des femmes et de la culture des Premiers Peuples.
Femme de cœur, Bibiane Courtois développe dans les années 1980 un programme pour améliorer les soins offerts aux personnes âgées, inspiré du modèle infirmier de Virginia Henderson. Sensible à la dimension culturelle des soins, elle contribue également au développement d'approches adaptées à la culture des Premières Nations et implante plusieurs programmes de prévention en santé communautaire en milieu autochtone. Au cours de ses 31 années de service, elle est reconnue pour son expertise en soins psychiatriques et cardiovasculaires ainsi qu'en santé communautaire. Son souci constant d'offrir des soins de grande qualité a été récompensé par la prestigieuse Insigne du mérite de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec en 1998.
Parallèlement à sa carrière, Bibiane Courtois milite pour des causes sociales. À la fin des années 1960, elle n'accepte pas d'abandonner son statut d'Indienne, à la suite de son mariage avec un non-Indien, comme le prescrivait une clause discriminatoire de la Loi sur les Indiens de l'époque. Élue présidente de Femmes Autochtones du Québec en 1983, elle contribue à l'abolition de cette clause injuste pour les femmes autochtones, en 1985. Cet accomplissement lui vaut d'être la première femme autochtone nommée à la Commission des droits de la personne et au Conseil du statut de la femme du Québec.
Améliorer la condition de vie et la santé des gens ne cesse d'être au cœur de ses préoccupations. Dans les années 2000, devenue directrice du Musée amérindien de Mashteuiatsh, occupée à rapatrier des objets culturels de sa communauté, elle se voue toujours à la même cause. Selon elle, sauvegarder la culture d'un peuple, c'est une autre façon de se préoccuper de l'épanouissement de la santé de ses membres.
Crédit photo: Martin Gaudreault, artiste photographe professionnel SAC.
Bernard Émond
Anthropologue, cinéaste et auteur
Doctorat honoris causa en anthropologie
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Bernard Émond a admirablement su tisser des liens fructueux entre sa formation en anthropologie et son œuvre artistique. Reconnu pour ses huit longs métrages, salués par la critique et qui ont été maintes fois primés ou sélectionnés par les grands festivals internationaux, il s'est aussi illustré par ses écrits littéraires et de critique sociale.
Dans les années 1970, Bernard Émond réalise ses premiers documentaires au Vidéographe et au Groupe d'intervention vidéo, dont il est un des membres fondateurs. Au même moment, il rédige un mémoire de maîtrise sur le cinéma ethnographique, puis enseigne l'anthropologie au cégep et comme chargé de cours à l'Université de Montréal. Attiré par la culture inuite, il travaille à partir des années 1980 dans le Grand Nord à la formation d'équipes de production vidéo pour Taqramiut Nipingat au Nunavik et, plus tard, pour l'Inuit Broadcasting Corporation au Nunavut. Son contact avec le Nord affine sa perception de la fragilité des cultures, qui deviendra un véritable fil conducteur de son œuvre. À cette époque, il publie aussi des textes d'idées, notamment dans Recherches amérindiennes au Québec et Le temps fou.
À partir des années 1990, il se consacre principalement au cinéma. Il signe cinq documentaires, puis entreprend son premier long métrage de fiction, La femme qui boit, en nomination pour cinq prix Jutra et autant de prix Génie. Suivent 20h17, rue Darling et La neuvaine, qui le consacrent en tant que cinéaste de premier plan. Il est aussi l'auteur du scénario de Ce qu'il faut pour vivre, qui a obtenu les prix Jutra et Génie du meilleur scénario en 2009. Autant dans son œuvre cinématographique que littéraire – qui comprend essais, nouvelles, roman et livre pour enfants –, cet anthropologue a posé un regard critique sur le monde contemporain, s'intéressant notamment au rôle de l'image, à la perte de repères et au délitement des liens sociaux.
Crédit photo: Hélène Bouffard
Camille Limoges
Professeur en histoire des sciences et haut fonctionnaire
Doctorat honoris causa en philosophie
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En 1964, Camille Limoges entreprend des études doctorales à l’Institut d’histoire des sciences et des techniques de la Sorbonne, sous la direction de Georges Canguilhem, l’un des plus grands historiens et philosophes de la biologie. Après une thèse novatrice dans laquelle il reconstitue la genèse du concept de sélection naturelle à partir des manuscrits de Darwin, il devient professeur d’histoire des sciences biologiques aux universités Johns Hopkins et de Montréal, il sera plus tard professeur invité aux universités Harvard et de Californie. Penseur déjà influent au début des années 1980, Camille Limoges suspend pourtant ses travaux pour contribuer à l’orientation des politiques du développement scientifique et technologique du Québec. Dès lors, l’approfondissement et la transmission des savoirs seront chez lui unis à des contributions citoyennes marquantes.
Parmi les instigateurs de la première Politique du développement scientifique du Québec, Camille Limoges est nommé sous-ministre du premier ministère de la Science et de la Technologie, qu’il organise, avant de devenir, de 1984 à 1986, sous-ministre du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Science. De retour à l’enseignement et à la recherche, cette fois à l’UQAM, il fonde, en 1993, le Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie (CIRST). De retour dans la fonction publique en 1997, il préside pendant deux ans le Conseil de la science et de la technologie du Québec, avant d’être nommé sous-ministre du ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie et d’assumer la coordination de l’élaboration de la nouvelle politique québécoise de la recherche et de l’innovation.
Camille Limoges a reçu maintes distinctions, dont le prestigieux prix Armand-Frappier, l’un des Prix du Québec. Depuis sa retraite en 2002, il a exercé des fonctions de conseil auprès de nombreux organismes scientifiques, avant de se consacrer à l’édition critique des œuvres complètes de Georges Canguilhem. Il prévoit de faire don à l’Université Laval de sa bibliothèque de plus de 2000 titres relatifs à ce philosophe.
Sir Fraser Stoddart
Titulaire du poste Board of Trustees Professor of Chemistry à l’Université Northwestern
Doctorat honoris causa en chimie
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Pionnier de la chimie moléculaire et supramoléculaire, sir Fraser Stoddart est reconnu pour ses travaux sur les molécules mécaniquement entrelacées, notamment les rotaxanes, qui ont conduit à la conception et à la synthèse des machines moléculaires artificielles. Cette innovation est si majeure qu’elle lui a valu, en compagnie des chercheurs Jean-Pierre Sauvage et Ben Feringa, le prix Nobel de chimie en 2016. Ses recherches ont ainsi permis à la chimie d’entrer dans une nouvelle ère où les systèmes moléculaires se rapprochent du fonctionnement des molécules vivantes.
Sir Fraser Stoddart obtient un doctorat en chimie de l’Université d’Édimbourg en 1966. Il quitte son Écosse natale en 1967 pour entreprendre des études postdoctorales à l’Université Queen’s, en Ontario. Il enseigne ensuite aux universités de Sheffield et de Birmingham, au Royaume-Uni, où il devient un chercheur de premier plan dans le domaine de la chimie supramoléculaire. En 1997, le chimiste se joint au corps professoral de l’Université de Californie à Los Angeles, où il est titulaire successivement de la Saul Winstein Chair in Organic Chemistry et de la Fred Kavli Chair in NanoSystems Sciences. Depuis 2007, il occupe le poste de Board of Trustees Professor of Chemistry à l’Université Northwestern, à Evanston en Illinois.
Nommé Knight Bachelor par la reine en 2006, sir Fraser Stoddart a reçu des dizaines de distinctions et d’honneurs au cours de sa carrière. Publiés par les plus prestigieuses revues, ses quelque 1250 articles scientifiques ont été cités plus de 125 000 fois. Cette sommité, à l’indice h de 149, a présenté plus de 1000 conférences à travers le monde et a formé près de 500 doctorants et stagiaires postdoctoraux.
Grand humaniste, le professeur Stoddart est réputé pour être un ardent défenseur de l'équité, de la diversité et de l'inclusion. Il soutient plusieurs causes, dont Girl Up de l'Organisation des Nations unies, qui vise à renforcer les compétences et le leadership chez les filles, et le projet SEED de l'American Chemical Society, qui permet à des jeunes issus de milieux défavorisés de faire des stages de quelques semaines dans des laboratoires de recherche universitaires avec des mentors reconnus.
Crédit photo: Jim Prisching